Extrait : Quelque chose de bleu / Comédie romantique

Nouvel extrait, issu de « Quelque chose de bleu » cette fois !
Une comédie romantique acidulée dans laquelle on suit l’itinéraire atypique de la jeune Lena dans ses préparatifs de mariage survoltés !
 
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EXTRAIT
 
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« Par chance, Paul avait opté pour la valse, et non le slow. Nous avions donc quelques centimètres de vide qui nous séparaient. Pour la première fois, je me sentis soulagée de ce choix de danse ringarde et vieillotte à mes yeux. Non sans peine, j’affrontais le regard de l’Américain qui me dépassait de presque deux têtes. Des mèches folles s’échappaient de son chignon brun, et sa barbe de quelques centimètres enchérissait sur cette allure négligée. Nous faisions tache, ni plus ni moins. Ses traits serrés marquaient clairement son aversion pour la situation, il n’appréciait guère plus que moi notre entrée en matière. Je sursautai lorsque Miguel posa une main dans le creux de mon dos.
— Allons, un peu de fierté, d’élégance ma chère. On se tient droite.
Il me releva le menton vers Cameron.
— Voilà, et ne fais pas cette tête, il faut prendre plaisir à danser.
— Je ne le fais pas de gaité de cœur, lui confiai-je. Mais pour ma belle-famille.
Je me demandai aussitôt pourquoi j’abordai ces détails privés avec ce professeur de danse.
— Qu’importe les raisons, tu es là, alors tu dois faire les choses de la bonne manière ma chérie. Et par pitié, détends-toi, on dirait que tu as un balai dans le derrière !
Je me figeai sous ses paroles, et Cameron pouffa. Je le foudroyai du regard. Consciente qu’il ne me lâcherait pas, j’obtempérai à contrecœur et tentai de me relâcher un peu.
— Voilà, comme ça. Il ne va pas te manger ce beau brun.
Super, voilà qu’il m’infantilisait.
— Bien, hurla Miguel en frappant dans ses mains. Voici comment on décompose la valse. C’est simple.
Alors qu’il comptait jusqu’à quatre, il se déplaça en avant, sur le côté, puis en arrière.
— L’important, c’est la fluidité. On gomme toute raideur dans les mouvements, il faut que les pas glissent tout seuls, et que les bras et la tenue du dos soient gracieux.
C’est tout moi, ça, la grâce, songeai-je, exaspérée.
Je soupirai, affrontant de nouveau le sourire malicieux de mon futur beau-frère.
— Un deux, c’est parti on essaie, hurla Miguel en appuyant sur sa télécommande.
Aussitôt, une musique datant d’un autre siècle résonna dans le vieux gymnase. Pire qu’un thé dansant réservé au troisième âge.
— C’est qu’un mauvais moment à passer, me souffla mon partenaire de danse, cherchant mon regard du sien.
J’inspirai profondément, consciente qu’il avait raison. Je faisais ça par respect pour la famille de Paul qui nous imposait un mariage traditionnel, je m’y contraignais par amour pour lui. Il m’en serait redevable, j’y comptais bien. Mais en attendant, je me devais d’assurer aujourd’hui en son absence, et je pouvais sérieusement remercier son frère d’avoir accepté ce cadeau empoisonné. Tous les couples suivaient le rythme, et non sans mal, je m’efforçai d’en faire autant, guidée par les grandes mains de l’Américain, confrontée à une proximité pour le moins saugrenue.
— On regarde son partenaire et on sourit ! C’est un échange, grand Dieu !
Je sursautai. Je n’avais pas vu Miguel revenir vers nous. Ses remontrances commençaient à m’agacer au plus haut point. Mais j’étais là pour jouer le jeu, alors je pris sur moi une fois encore, et relevai le visage vers Cameron avec la certitude d’être ridicule. Dès que le tortionnaire s’éloigna, je rompis ce sourire forcé et levai les yeux au ciel.
— Merci, soufflai-je. Tu n’étais pas censé supporter ça, en tant que témoin. C’était à Paul d’assumer ce genre de tâche, pas à toi.
— Ça ne fait rien, se contenta-t-il de réponse. C’est mon rôle de vous aider.
— Oui, mais pas jusqu’à ce point.
— Danse, où le roi de la Macarena va t’achever en public, se moqua-t-il gentiment.
Je souris. Je devais lui reconnaître un don certain pour détendre l’atmosphère et désamorcer des situations gênantes. Grâce à sa quiétude, je regagnais confiance en moi et parvenais à refaire surface dans des circonstances où j’aurais dû me trouver gagnée par l’embarras. Je ralentissais doucement mon souffle, profitant de la sérénité qui émanait du grand costaud. Contre toute attente, il semblait avoir pris ses aises sur cette danse d’un autre temps, c’en était déroutant.
— Tu es meilleur danseur que moi, constatai-je admirative.
— Il suffit de faire un carré, m’indiqua-t-il en poursuivant le mouvement que Miguel nous faisait répéter en musique. Pas besoin d’être bon danseur pour ça.
— Pourtant ça n’a rien à voir avec du rock, m’amusai-je.
— Non, c’est certain !
— Je trouve ça ringard, murmurai-je.
— Et moi donc…
Je jetai un regard aux autres couples qui tournoyaient dans la pièce, certains très jeunes, et un plus âgé. La plupart d’entre eux paraissaient ravis de se laisser guider par les violons et le piano. Plus que jamais, je ne me sentais pas à ma place.
— En plus ces talons sont une horreur, maugréai-je, mes baskets me manquent.
Une fois encore, mon partenaire s’amusa de mes plaintes. Lena Cornen dans toute sa splendeur.
— On s’ennuie, hein ? glissa Cameron, le regard animé d’une lueur nouvelle.
Je ne comprenais pas où il voulait en venir, mais en effet, il disait vrai.
— Pas qu’un peu.
— Un cours un peu plus rock’n roll ça pourrait être sympa, ajouta-t-il.
J’arquai un sourcil, pensive.
— En effet, mais…
Je n’eus pas le temps de terminer ma phrase que mon cavalier resserra ses solides bras autour de ma taille et nous fit tournoyer à une vitesse folle le temps de quelques tours. Je ne pus échapper un cri de surprise. J’éclatai de rire comme une gamine sur un tourniquet. Lorsqu’il interrompit ses rotations, Cameron me laissa retoucher le sol en prenant soin d’y aller en douceur ; mes chevilles montées sur talons aiguilles l’en remercièrent. Consciente que d’ici quelques millièmes de seconde Mister Cruz allait nous faire une remontrance cinglante, je profitai une dernière fois de l’euphorie de l’instant, m’esclaffant sans retenue.
— C’était plus rock, comme ça, glissa mon cavalier amusé par notre pas de danse improvisé.
Déjà, un claquement de mains résonnait derrière moi. Miguel.
— Non, mais dites donc, tous les deux. Si vous êtes venus pour faire un remake de Dirty dancing, vous pouvez repartir chez vous ! Ici, c’est du sérieux ! On valse !
Nous nous regardâmes comme deux enfants pris en flagrant délit, et explosâmes de rire. Je levai une paume pour m’excuser, face au regard noir du professeur de danse.
— Je suis navrée, on va se reprendre, assurai-je entre deux gloussements.
— Bien. Sinon, dehors !
Je toussotai pour regagner mon sérieux et le grand brun en fit de même.
— Pour la peine, les petits prodiges du porté vont nous montrer qu’ils ont bien retenu la leçon du jour. On vous regarde Bébé et Johnny, action !
Je déglutis lorsqu’il claqua des mains. Ce que je craignais arriva. Miguel enclencha la musique à son commencement et tous les couples présents nous observèrent, moqueurs. Nous devenions les bêtes de cirque de la séance.
— T’es prête ? me souffla Cameron, plus sérieux que jamais.
Penaude, je hochai ma tête.
— Un mauvais moment à passer, hein ?
— Yep.
L’argot américain reprenait le dessus dans cet instant de stress. Il semblait impassible, mais je décelai tout de même un peu d’agitation dans ses prunelles grises.
Un pas, puis un autre, un petit, puis un grand. Nous tournions avant même que je ne réfléchisse au déroulé à suivre. Il me guidait, je le suivais simplement. Bien que peu expérimentés, il me sembla que notre fierté partagée fut un moteur pour nos pieds débutants. Hors de question de ne pas relever ce défi. Hors de question d’être ridicules une fois encore. Quand la musique s’interrompit, je pris quelques instants pour réaliser ce qui venait de se produire. Je regardai mon cavalier, et il en fit autant. Nos souffles entraînés par la tension de l’instant nous ôtèrent toute répartie. Le silence s’imposait dans la salle.
Finalement, Miguel applaudit. À ma grande surprise, nous venions de donner le meilleur de nous-mêmes et avions cloué le bec aux personnes ici présentes, y compris au professeur. Il se rapprocha de nous, tandis que nous n’avions pas bougé d’un iota, comme prêts à repartir pour une nouvelle danse. J’observai le grand rockeur qui venait de me faire évoluer sur la piste comme si j’avais toujours dansé, partagée entre surprise et trouble.
— Eh bien si tu danses comme ça le jour de ton mariage ma belle, tu vas en épater plus d’un. J’espère que le futur mari sera à la hauteur !
Le clin d’œil qu’il me glissa me fit émerger de ma stupeur, et je ne pus réprimer un rire de soulagement. Mon souffle reprit une allure plus convenable et je relâchai la main de mon cavalier, tout en le gratifiant d’un regard.
— Allez, ça ira pour aujourd’hui hurla Miguel à sa classe. Répétez bien chez vous, on se revoit dans une semaine !
Alors que les autres couples regagnaient la sortie, il revint vers nous. À croire qu’il ne pouvait plus se passer de ses danseurs débutants. De son allure élégante et originale, il me détailla de la tête aux pieds ; mais cette fois-ci, sans jugement aucun. Une première ! Je l’avais donc bluffé.
— Bon, ma jolie, il te reste à apprendre tout cela à ton futur mari. À l’avenir, tous les deux, évitez ces élans de joie dans mon cours. Cela déconcentre les autres couples.
Soudain l’air sévère disparut complètement de son front, et pour la première fois, je le vis sourire. Le faux sosie de Miguel Angel Munoz pouvait donc s’avérer sympathique ! Il me refila un coup de coude et son regard se fit espiègle.
— Et si tu veux mon avis, évite de t’envoyer en l’air avec le témoin du marié, ça fait mauvais genre !
Je restai muette face à ces propos, choquée.
Miguel explosa de rire et Cameron semblait lui aussi trouver cela drôle. Visiblement, je venais de louper une étape.
— S’envoyer en l’air ! s’exclama Miguel en me tapant l’épaule. C’était un jeu de mots ma belle, ne fais pas cette tête.
Il pouffa de plus belle avant de repartir en direction de sa chaîne stéréo. Je souris brièvement, comprenant qu’une fois encore, je venais de passer pour une idiote. Une idiote à retardement.
— On y va ? me lança l’Américain, on va manquer l’heure du rendez-vous au studio sinon.
— Ouais, on y va.
Voilà qui tombait à pic, l’enregistrement au studio. Cet après-midi, je serai spectatrice uniquement : plus de prise de risques, plus d’instant de solitude. Juste du bon rock et un accès VIP en prime. À moi la belle vie ! « 
 
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Blandine P. Martin devient une auteure française de référence pour moi, j’aime ses romans qui arrivent à me toucher, à toucher mon âme. » Aur Addict aux livres
 
« C’est une histoire parfaite pour celles et ceux qui aiment les jolies romances, qui se mettent en place doucement mais sûrement. C’est rempli de sentiments, c’est touchant. À lire sans modération. » Un chapitre de plus
 
« Le message que laisse passer l’auteur sur le fait de vivre sa vie comme on l’entend et non pas comme une tierce personne le décide, ou sur le fait de prendre du plaisir à faire ce que l’on fait et de ne pas en avoir honte, est vraiment très beau et tellement important pour chacun ! Une belle romance, Blandine P. Martin, a mis un peu de rose et de bleu dans mes yeux le temps d’une lecture. » Mari-Nel lit
 
Quelque chose de bleu

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